Radio Libre Albemuth

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Revenons brièvement sur la naissance de Radio Libre Albemuth pour les distraits. Le roman, initialement intitulé Valisystem A (ou encore To Scare the Dead) était conçu comme un prolongement de Coulez mes larmes, dit le policier. En effet, il en reprend et développe la description d'une société américaine totalitaire. Mais le texte dépasse la simple notion de suite rapidement.
Refusé en 1976, l'éditeur demande trop de modifications, Dick s'embarque immédiatement dans ce qui sera certainement son ultime chef-d'oeuvre : SIVA dont Radio Libre Albemuth n'est finalement que la matrice ou, comme le dit joliment l’édition française, un prélude. D’ailleurs le roman se retrouve condensé dans SIVA sous la forme du film que les personnages vont voir. Nous parlerons bien un jour de la mise en abyme chez Dick, alors n’allons pas trop loin.
Dick donnera le manuscrit abandonné à son ami Tim Powers. Il ne sera publié qu'en 1985, de façon posthume.
Relire le livre aujourd'hui est une expérience étonnante. Parce que la lecture se trouve rapidement contaminée par les souvenirs de
SIVA ou encore par la connaissance de la vie de Dick. Ensuite parce que le roman tient parfaitement la route en lui-même.

Radio Libre Albemuth


La première partie est intitulée ‘PHIL’.
PKD en est le narrateur.Il raconte l’histoire de Nicholas Brady. Ce dernier travaille à Berkeley, dans une Amérique uchronique gouvernée par un incompétent ultra-conservateur en lutte avec une organisation clandestine, Aramchek. Le président Ferris F. Fremont est un avatar grotesque et montrueux de Joseph McCarthy et Richard Nixon, celui que ses initiales désigne comme l’Antechrist (FFF=666 !). Brady vivote sans réellement nuire à personne. Jusqu’au jour où un certain rayon rose le frappe et l’amène à entrer en contact avec une entité extra-terrestre bienveillante, SIVA, qui communique avec lui depuis les étoiles.
La deuxième partie est intitulée ‘NICHOLAS’ et voit une bascule de narrateur.
Brady prend désormais la parole alors que le récit se concentre autour de la lutte contre le pouvoir totalitaire de Ferris F. Fremont et que l’uchronie prend tout son sens.

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Largement autobiographique, nous voyons poindre ici de nombreuses préoccupations propres à la dernières période de Dick. Les principales étapes de la crises de 1974 sont évoquées (lire à ce sujet la bande dessinée de R. Crumb The Religious Experience of Philip K. Dick). Dick a choisi de diviser cette expérience sur ces deux personnages. L’un écrivain de science-fiction, l’autre celui qu’il aurait pu devenir s’il avait continué à vendre des disques à Berkeley. Le dialogue entre les deux vise ainsi à faire émerger une compréhension de ce qu’est SIVA. Nous voyons transposé ici de manière romanesque le dialogue que Dick menait avec lui-même dans son Exégèse, avec ses correspondants ou ses proches.
En effet l’interrogation ne porte plus sur la nature de l’humain mais sur le rapport avec le divin et la transcendance. La paranoia, la question sur la nature même de notre réel poussent toutes dans une direction mystique et aboutissent même dans une éthique de la résistance.

Beaucoup jugent le roman comme mineur, parce que publié de manière posthume, parce qu’en partie inachevé, parce que souvent confus et ne possédant pas le brio de
SIVA. Je ne partage pas cet avis. J’aime son efficacité, son humour et la vivacité avec laquelle l’intrigue progresse.

Consulter la fiche du livre.

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